2009, année électorale en Allemagne

Publié le par Jeunes Socialistes 03

L'année 2009 s'annonce des plus trépidantes pour les citoyens allemands. En effet, il aura lieu pas moins de cinq élections régionales (en Hesse, en Sarre, en Saxe, en Thüringe et dans le Brandenbourg), ce à quoi s'ajouteront l'élection présidentielle (le Parlement seul élit le Président de la République fédérale allemande), les élections européennes en juin et surtout les élections législatives du 27 septembre.


Il est bon à savoir que l'Allemagne est un pays fédéral c'est à dire que les prises de décisions sont faites à deux niveaux : le Land (la région) a le pouvoir de faire des lois dans tous les domaines sauf dans ceux qui relèvent expressement de la compétence du Bund c'est à dire de l'Etat fédéral. C'est un système qui est fort différent de notre système français, extrêmement centralisé à Paris. D'où l'importance des enjeux des élections régionales en Allemagne car, vous l'avez compris, nos régions françaises ont très peu de pouvoir comparées aux Länder allemands ! D'ailleurs, il est intéressant de constater qu'un habitant de Munich se considère d'abord comme bavarois avant de se considérer comme allemand. Les élections régionales sont donc à observer de très près...

Et elles le méritent car de nombreux bouleversements sont attendus, notamment en Sarre.

La Sarre va être au coeur de la vie politique allemande le 30 août prochain (jour des élections régionales) car une coalition, pour le moins surprenante et impensable il y a encore de cela quelques mois en ex-Allemagne de l'Ouest, risque de voir le jour.


Avant de dévoiler la teneur de ce bouleversement, il faut rappeler quelques lieux communs sur le mode de scrutin en Allemagne. Pour les échéances électorales allemandes, les votes se font à la proportionelle ce qui oblige les partis à faire des coalitions pour accèder au pouvoir. Cela signifie donc que le parti arrivé en tête n'est pas le gagnant sauf s'il obtient la majorité absolue (chose très rare !). Et cela signifie aussi que de nombreuses tractations ont lieu entre les partis pour se mettre d'accord sur un projet commun.

En Sarre, la CDU ( parti de droite) est créditée dans un récent sondage de 38% des voix (lors des dernières échéances électorales, la CDU avait obtenu 47.5% des suffrages exprimés, soit une baisse de 10 points !). Le SPD (PS allemand), quant à lui, est crédité de 25% des voix alors qu'il avait obtenu près de 31 % des voix lors des dernières élections. Les deux grands partis allemands sont donc en perte de vitesse en Sarre ce qui est loin d'être le cas de Die Linke ! Die Linke est un parti d'extrême-gauche (fondé par Oskar Lafontaine) qui rassemble d'anciens communistes et surtout les déçus du SPD, jugé trop social-démocrate, trop à droite. Pour nous français, il peut se comparer, dans le principe, à l'initiative de Jean-Luc Mélenchon (ancien socialiste) avec la création du Parti de Gauche en novembre dernier suite à la victoire de Ségolène Royal lors du vote sur les motions au sein du PS et, dans la pratique, Die Linke peut être comparée à la LCR qui a à peu près les mêmes idées. En Sarre, donc, Die Linke a obtenu 2,3% des voix lors des dernières élections mais, elle est aujourd'hui créditée de ... 23% ! Tous les commentateurs politiques annoncent la mise en place d'une coalition inédite : eine Rot-Rot c'est dire un coalition rouge-rouge entre le SPD et Die Linke dans le région de Saare ! Mais, une telle coalition peut-elle voir le jour quand on connaît l'animosité entre les deux partis ? ll y a quelques mois, le SPD refusait toute coalition avec Die Linke en ex-Allemagne de l'Ouest. Aujourd'hui, le SPD l'accepte dans la mesure où le SPD garde la direction du gouvernement régional. Le SPD ne peut passer outre le poids de Die Linke. Affaire à suivre le 30 août...

Au niveau fédéral, le 27 septembre, tout est incertain !


Die Linke est le parti qui enregistre la plus forte progression dans les sondages. Elle est créditée de 12% (8.7% aux élections de 2005). Le SPD est en perte de vitesse avec une chute de 8 points par rapport aux résultats de 2005, passant de 34.2% à 26% seulement. Quant à elle, la CDU se maintient plutôt bien avec 35.2% des voix en 2005 contre une prévision de 35% des voix pour 2009.
Actuellement, l'Allemagne est dirigée par une Grande Coalition entre la CDU et le SPD, et la Chancelière (=Premier Ministre, personnalité politique de premier plan en Allemagne à la différence de la France où c'est le Président de la République) est Angela Merkel (CDU). Certains pensent que cette Grande Coalition entre droite et gauche se poursuivra jusqu'en 2013, ce qui serait la première fois en Allemagne qu'une Grande Coalition soit reconduite. Il faut dire que cette configuration s'est montrée très efficace pour gérer les effets de la crise économique même s'il y a un manque criant d'opposition au Bundestag (=Assemblée Nationale). Ou bien, une coalition entre le SPD, les Libéraux et les Verts peut voir le jour, ou encore, une coalition dite "Jamaïque" entre la CDU, les Libéraux ou les Verts. Ou peut-être, une simple coalition entre la CDU et les Libéraux.
En tous cas, l'enjeu de cette élection est clair : les électeurs allemands doivent déterminer à quelle coalition ils font le plus confiance pour lutter au mieux contre les effets de la crise en Allemagne. Réponse le 27 septembre...

Une chose est certaine : le candidat du SPD, Frank-Walter Steinmeier, est en mauvaise posture pour devenir le futur Chancelier... Le SPD souffre effectivement de la Grande Coalition où il vit dans l'ombre d'Angela Merkel et de ses réussites sur le plan international et aussi intérieur. Et, puis, l'affaire Ypsilanti (SPD) en Hesse n'a rien fait pour arranger les choses. Ypsilanti a en effet eu beaucoup de mal à constituer une coalition entre le SPD, les Verts et Die Linke dans la région de Hesse alors que la CDU sortait très affaiblie du scrutin. Suite à cet échec d'Ypsilanti, les électeurs de Hesse doivent retourner aux urnes dimanche prochain tout en sachant que le SPD a perdu près de 12 points (de 36.7% (élections de 2008) à 25% (sondage)) alors que la CDU a, elle, progressé, passant de 36.8% (élections de 2008) à 41% (sondage). Les électeurs semblent en avoir assez du SPD et de son incapacité à former une coalition...Cette élection sera certainement de mauvaises augures pour le SPD en cette année électorale cruciale qu'est 2009...
Et, en ce qui concerne Die Linke, les commentateurs politiques se montrent plutôt pessimistes. Les Allemands ne semblent pas avoir envie au niveau fédéral d'une expérence politique novatrice et préfèrent la sécurité d'un gouvernement traditionnel. Mais, si les effets de la crise sont de plus en plus prégnants dans la société allemande (taux de chômage en hausse, etc...), il n'est pas impossible que Die Linke engrange les bénéfices du mécontentement de la population...

Le SPD et Die Linke sont deux partis voués à s'entendre s'ils veulent que la gauche reprenne un jour le contôle politique de l'Allemagne. Une leçon pour la France ?

par T.D.

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